Surprécarité des femmes dans le travail associatif, témoignage à l’occasion du 8 mars

Les inégalités femmes-hommes au travail impactent le secteur associatif comme tous les secteurs professionnel. Bien que le secteur associatif soit très fémininisé, avec 68 % de salariées, les hommes restent fortement majoritaires dans les directions. Les femmes sont les premières victimes de la précarité, très présente dans nos structures  avec un recours aux temps partiels, aux bas salaires, aux contrats atypiques et précaires très élevé (près de 50% des contrats). En plus de ces conditions de travail très dégradées, elles subissent, plus que les hommes,  des situations de harcèlement, de dénigrement, de reproduction de la violence masculine.  A l’occasion du 8 Mars, ASSO a décidé de publier le témoignage d’une salariée d’une association de femmes afin que tou.te.s, nous prenions conscience de cette inégalité.

« L’année dernière, récemment diplômée, j’ai eu l’opportunité d’intégrer l’asso X, pleine d’enthousiasme et de motivation à l’idée de travailler dans un secteur qui me tient à cœur et dans un contexte dynamique et exigeant. Nous sommes une petite équipe de deux salariées à temps plein (la secrétaire générale/manager intègre l’association peu de temps après moi). Très vite les missions et activités s’enchainent, et après mon premier CDD on m’en propose un deuxième, pour continuer à me « tester », ma manager ayant encore des doutes. Je prends cela comme un défi et fais tout mon possible pour réussir mes missions, et à l’issue de ce deuxième CDD, je décroche un CDI !

De manière générale, ma relation avec ma manager est plutôt bonne, si ce n’est un traitement assez infantilisant et des remarques parfois déplacées. M’étant toujours investie en acceptant de réaliser des heures supplémentaires non rémunérées quand nécessaire malgré mon maigre salaire, je m’y oppose un jour, pour une raison personnelle. A cette occasion ma manager se brusque, me dit clairement que les heures supplémentaires non payées sont nécessaires dans le contexte de ce poste, et qu’« il ne va pas être possible de continuer comme cela », malgré mon statut de junior non cadre et une différence de salaire du simple au double entre nous deux.

Quelques semaines plus tard, elle dresse un bilan extrêmement négatif de mon travail, et quelle n’est pas ma surprise quand elle me demande tout bonnement de…quitter l’association, peu de temps après ! En effet, je serais une « erreur de casting », et l’association aurait sous-estimé les compétences et l’expérience nécessaires au poste ! Au bout de quasiment un an, cela me paraît tout de même un peu grotesque. Elle embraye sur les modalités du départ, proposant rupture conventionnelle et réalisant une menace à peine voilée : « bonne chance à toi si tu vas aux prud’hommes ! ». Je suis sous le choc, et à peine deux jours après elle me prend à part pour me demander si j’ai choisi une solution et me demande, plein de condescendance, si « je suis inquiète ». Je demande alors à rencontrer la présidente, qui s’en lave les mains, reconnaît que je ne suis pas « incompétente » et délègue son pouvoir à la secrétaire générale.

Sur les conseils de mon entourage, j’accepte de discuter d’une rupture conventionnelle que je signe finalement une semaine plus tard. La discussion qui a suivi n’a fait que souligner les paradoxes du discours de ma manager, secrétaire générale d’une association de femmes mais visiblement pas emballée par le concept de sororité. Elle m’incite par exemple à garder mon appartement à Paris en faisant des babysttings si nécessaire pour survivre, me rappelant que je suis jeune et que je dois encore faire mes preuves, que j’« ai un côté pas débrouillard » et que j’ai peut-être « commencé ma vie professionnelle trop tôt » ! Bref, qui veut tuer son chien l’accuse de la rage, dit-on souvent. Elle se veut rassurante et va jusqu’à assurer que je le remercierai un jour de m’avoir virée.

Certaine de m’avoir accordé une grande faveur avec la rupture conventionnelle, elle continue à exiger de ma part une motivation et un travail sans failles, en adoptant un comportement très ambigu. Elle est à la fois amicale et mielleuse à mon égard, comme si rien ne s’était passé (me proposant de l’aide pour ma recherche d’emploi, un déjeuner au restaurant…), tout en usant de la menace et du chantage si je refusais une tâche qui à la base ne m’était pas dédiée. Elles estimait en effet qu’ils «avaient été sympas avec moi » jusque-là, et qu’ils « voulaient bien me donner une prime, mais qu’il fallait travailler jusqu’au bout » !

Au final, j’ai quitté l’association assez désabusée, estimant m’être investie pour des principes qui me tenaient à cœur, alors que mes droits les plus élémentaires de salariée ont été piétinés. Ainsi, pas un seul avertissement, blâme ou sanction préalable au licenciement !

Cerise sur le gâteau : ma manager, qui arguait d’un manque de compétences et d’expérience, m’a remplacée…. par une stagiaire ! Qui effectuera les mêmes missions que moi, puisque j’ai eu l’occasion de lire ses termes de références. »

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