Le 19 février 2024
La ministre Aurore Bergé a menacé dimanche 11 février de couper les subventions des associations féministes « à la moindre ambiguïté » sur l’attaque du 7 octobre. Nous dénonçons l’instrumentalisation du combat féministe pour punir celles et ceux qui ont des opinions divergentes de celles du gouvernement.
Ni Aurore Bergé, ni les autres ministres, ni Emmanuel Macron n’ont de leçon de féminisme à faire aux féministes.
Depuis 2017, depuis que le mouvement des femmes est devenu incontournable, Macron et ses ministres n’ont eu de de cesse de s’en réclamer tout en le mettant au service de leur agenda, aux dépens des femmes qui plus que jamais luttent contre les violences et les discriminations.
Tout en faisant du féminisme la « grande cause du quinquennat », le président Macron et ses ministres n’ont eu de cesse de saboter le travail contre les violences sexistes et sexuelles :
• inquiétudes sur « une société de la délation généralisée » (E. Macron, 25 novembre 2017),
• déguisement du sous-financement des associations (« 420 millions dédiés à la lutte, vraiment ? », encore en 2017),
• traitement « d’homme à homme » et complaisance envers les ministres accusés de violences sexuelles,
• soutien aux personnalités accusées de violences sexuelles, qui feraient « honneur à la France »,
• instrumentalisation et traitement différencié des violences sexuelles, celles des « ennemis » politiques devant être sans cesse rappelées et condamnées tandis que celles des alliés sont tues, le féminisme étant ainsi utilisé dans des procès à charge, souvent sur fond de racisme.
La menace de cesser de financer les associations féministes s’inscrit dans une longue suite de prises de positions préjudiciables aux femmes et complaisantes envers leurs agresseurs, mal cachées derrière des discours pseudo-féministes. Nous dénonçons cette manie de s’en prendre aux libertés associatives chaque fois qu’une association ose s’exprimer contre l’avis du gouvernement. Et nous la dénonçons avec d’autant plus de vigueur quand ces associations assurent les missions de service public d’un État défaillant, qui s’est défaussé sur les associations militantes de missions essentielles comme la lutte contre les violences sexuelles, de la prévention et de l’éducation à l’accompagnement des personnes victimes.
Nous dénonçons par la même occasion cette instrumentalisation du féminisme à des fins racistes qui visent à hiérarchiser les vies humaines et à justifier un génocide. Notre féminisme ne peut qu’être anti-raciste, par et au service de la liberté de toutes les femmes. Notre féminisme n’est pas au service de l’impérialisme ou de la suprématie blanche et la lutte pour les droits des femmes ne pourra jamais être instrumentalisée pour justifier des projets coloniaux et/ou génocidaires. Notre féminisme est international et anticolonial !
La volonté hégémonique d’un président et d’un gouvernement mal élus, leur prétention à dire quelles sont les « bonnes » associations féministes et quelles sont les « mauvaises » se heurte à la réalité : ce sont les associations et les militantes féministes qui aujourd’hui font le boulot. Leurs menaces sur ces associations font de ceux qui les profèrent les ennemis des femmes et les alliés objectifs du patriarcat.
Les associations assurent souvent des missions qui ont été abandonnées par l’État, qu’il a externalisées, qu’il fait mener à moindre coût, en partie sur du bénévolat, qu’il pilote par appels à projets. Non seulement il dicte les (mauvaises) conditions matérielles de réalisation de leur action mais il prétend désormais mieux connaître la réalité du terrain qu’elles, condamner leurs projets et prises de position politiques, jusqu’à menacer de mettre en danger leur existence pour s’assurer leur obéissance.
Nous, salarié-es du secteur associatif, dénonçons ce mépris pour les associations et toutes les atteintes aux libertés civiles qui se sont multipliées depuis 2017, contre la liberté de manifester, la liberté de la presse et la liberté d’association.